DEMOULE (J.-P.) 1999 / Chronologie et société des nécropoles celtiques de la culture Aisne-Marne, du VIème au IIIème siècle avant notre ère, Supplément n°15 à la Revue Archéologique de Picardie, Amiens, 406 p.
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Ce travail a pour la première fois établi une chronologie détaillée et vérifiable de l’ensemble des tombes de l’ âge du Fer (périodes Hallstatt D et La Tène A-B, du VIe au IIIe siècle avant notre ère) dans le nord et l’est du Bassin parisien. Cet espace est celui de la « culture Aisne-Marne », que l’ouvrage s’attache à caractériser dans ses différentes manifestations. Des milliers de tombes y ont en effet été fouillées mais très souvent sommairement et sans enregistrement documentaire exploitable. Néanmoins une dizaine de nécropoles ainsi qu’une centaine de tombes isolées ont pu être exploitées, soit environ 2.000 tombes. Cette chronologie en une dizaine de phases, de l’ordre chacune d’une génération, permet aussi de mettre en évidence les continuités et les ruptures dans les styles et les techniques des objets (poteries, armes, parures), mais aussi dans les pratiques funéraires. Ces dernières ne témoignent pas de normes contraignantes uniformes, les normes variant selon les régions, et même selon les nécropoles. Projetée sur l’espace des différentes nécropoles, la chronologie permet d’en montrer l’organisation et l’évolution. Regroupées selon le sexe au Hallstatt final, les tombes s’organisent en enclos familiaux à La Tène ancienne, ce que confirme l’étude de certains caractères génétiques. Les premières tombes à char caractérisent le Hallstatt final (fin du VIe siècle. Elles disparaissent au début du Ve siècle, tandis que les nécropoles changent en général d’emplacements et montrent beaucoup moins de différences sociales. Les tombes à char réapparaissent à la du Ve siècle et au début du IVe siècle, puis disparaissent à nouveau, tandis que la démographie des nécropoles chute brutalement, phénomène qui peut être mis en relation avec les mouvements de population vers le sud, bien documentés par les historiens grecs et romains (prise de Rome, etc). A l’échelle régionale, on peut grâce à l’abondante documentation (plus de 400 nécropoles connues et cartographiables) reconstituer des terroirs et y mettre en évidence deux modèles funéraires distincts, soit une seule grande nécropole, soit de petits groupes de tombes espacées. La démographie peut en être estimée et on peut déterminer, en fonction de la présence ou non de tombes à char, une hiérarchie entre les terroirs en deux, sinon trois niveaux. Ce travail s’est prolongé par la fouille et la publication en trois volumes (avec Claudine Pommepuy et Sophie Desenne) de l’importante nécropole de Bucy-le-Long (Aisne), qui a permis à la fois d’en valider la plupart des hypothèses et des résultats, et de l’enrichir pour une meilleure connaissance du IVe siècle. En outre, la présence dans cette nécropole de quatre tombes à char riches et exceptionnellement féminines a constitué une surprise et montre que la communauté de cette nécropole a joué un rôle régional éminent.